Contribution à la concertation sur l’énergie France
Contribution publiée sur
https://concertation-strategie-energie-climat.gouv.fr/
dans le cadre de la concertation engagée par le Gouvernement sur l"énergie en France, concertation ouverte jusqu'au 31 décembre 2022.
Dans une perspective de bien être social le plus largement partagé et de respect des générations futures, j’y souligne notamment :
- Nécessaire prise en considération du nucléaire en Europe, avec la sûreté nucléaire en priorité une, comme un atout stratégique de premier rang en tant qu’énergie pilotable décarbonée pour la production d’électricité, et non comme une énergie transitoire.
- L’électricité française déjà décarbonée, grâce au parc hydraulique et nucléaire existant, doit conduire, au regard du principe de subsidiarité de l’Union Européenne, à réinterroger le calendrier de déploiement du nouveau renouvelable en France.
- Avec une intermittence qui peut introduire une variation de 1 à 100 en plein hiver (cf la production éolienne d’électricité qui a varié en janvier 2022 en France de 155 MW à 14848 MW ), le respect des engagements pris au titre de la COP 21, au niveau de la France et de l’Union Européenne, exige, au préalable de tout nouveau développement de renouvelable intermittent, de prendre en considération le pilotable décarboné disponible et garanti prévu dans les décennies à venir, avec des marges suffisantes au regard de la sûreté du système électrique et des objectifs de diminution des émissions de carbone.
- La régulation Arenh, dont la seule finalité est l’ouverture du marché à la concurrence, sans prise en compte, ni des risques industriels, ni de la valeur ajoutée par l’opérateur historique engagé dans des missions de service public portant notamment sur la sécurité d’approvisionnement en production pilotable décarbonée d’électricité pour le plus grand nombre, doit être supprimée.
Thème 1 : Comment adapter notre consommation pour atteindre l’objectif de neutralité carbone ?
1.1 - Les mobilités
Les déplacements de marchandises et de personnes vont continuer à se développer, sur terre, sur mer et dans l'espace, car l'Afrique, encore très en retrait, va se développer comme les autres continents, et l'aspiration à la diminution des écarts entre les plus riches et les plus pauvres l'emportera au bénéfice du bien-être social collectif le plus largement partagé. Pour autant, les sources d'énergie primaire devront être sélectionnées décarbonées pour lutter avec efficacité contre l'effet de serre climatique, et devront respecter les générations futures.
Cela suppose le choix de la sobriété et de la performance énergétique dans l'usage final dans le transport, et des infrastructures collectives qui valorisent les sources d'énergie propre. D'où le nécessaire soutien aux points suivants:
- Interconnexion électrique à développer tout autour de la Mer Méditerranée et en Afrique, avec soutien en Europe de l'électricité décarbonée,
- Soutien de l'électricité nucléaire en Europe en tant qu'énergie pilotable décarbonée, soutien dans le développement de l'accès au nucléaire pour les nouveaux pays entrants avec priorité une à la sûreté nucléaire,
- Liaisons ferrées en Europe valorisant l'électricité bas carbone aujourd'hui déjà disponible en France,
- Propulsion nucléaire et à vent pour le transport maritime, avec conjointement des dispositions ad hoc pour les navires, pour les infrastructures portuaires, et pour les routes maritimes,
- Des réseaux développés de points de charge pour les véhicules électriques individuels et collectifs,
- Le développement de l'inter-modularité entre transports collectifs décarbonés, avec aménagement du territoire et de l'urbanisme en conséquence,
- L'utilisation sans gaspillage d'hydrogène produit par une source décarbonée (nucléaire ou renouvelable) pour le transport terrestre ou aérien, à réserver pour les mobiles non connectés au réseau électrique.
A noter que les nouvelles mobilités électriques propres, électricité/hydrogène, produites à partir de sources d'énergies décarbonées, peuvent induire de nouvelles opportunités voire de nouvelles ruptures technologiques dans le déplacement aérien de courte et moyenne distance, avec redistribution en profondeur des modalités d'aménagement des territoires et de l'urbanisme. Ce qui nécessitera des modes de concertation d'autant plus développés avec les populations concernées.
1.2 - L'usage des bâtiments
La performance énergétique des bâtiments, des bureaux, et des lieux de commerce et de vie ne doit pas se faire au détriment du bien-être social et économique le plus partagé possible. Pour autant le choix des sources primaires d'énergie doit se faire en sélectionnant de manière privilégiée les sources décarbonées pour lutter avec efficacité contre l'effet de serre climatique (notamment l'électricité en France déjà décarbonée) et en privilégiant la performance énergétique pour éviter tout gaspillage et pour respecter les générations futures.
L'accès partagé à l'information de la performance énergétique, pour tous les utilisateurs, occupants, conditionne leur attention et leur vigilance sur leurs comportements au quotidien.
La rénovation du parc existant peut être très longue. L'accès facilité au logement est conditionné par un urbanisme et des infrastructures collectives efficaces et étendues (cf réponse sur la mobilité). Cet accès facilité, appuyé par des infrastructures collectives et un urbanisme adaptés, devra développer la capacité collective à faire évoluer le parc existant, et donc sa rénovation qui ne peut être réalisé à ce stade que sur plusieurs décennies.
Les choix architecturaux devront privilégier l'apport naturel du soleil, la prise en compte des conditions météorologiques et aussi la valorisation du patrimoine culturel et urbanistique.
1.3 - Le niveau d'activité industrielle et du transport de marchandises
Comme indiqué sur la question mobilité, les déplacements de marchandises et de personnes vont continuer à se développer, sur terre, sur mer et dans l'espace, car l'Afrique, encore très en retrait va se développer, comme les autres continents, et l'aspiration à la diminution des écarts entre les plus riches et les plus pauvres l'emportera au bénéfice du bien-être social collectif le plus largement partagé. Pour autant, les sources d'énergie primaire devront être sélectionnées décarbonées pour lutter avec efficacité, contre l'effet de serre climatique, et devront respecter les générations futures.
Ces dispositions, notamment celles décrites dans la question portant sur la mobilité, appellent à de l’innovation et à des capacités industrielles développées, en France, comme en toute l’Europe et dans les autres continents.
Il convient de rompre avec la spécialisation géographique, source de dépendance et d’exploitation. Les échanges doivent s’établir dans une perspective de coopération et de solidarité, et non de concurrence ou d’interdépendance entre territoires ou pays.
L’industrie, dans ses différentes composantes, permet de soutenir l’accès généralisé au bien-être social et économique, et le plus largement partagé. Elle appelle à des compétences individuelles et collectives qu’il convient de développer avec un système éducatif et professionnel adapté. Elle doit s’intégrer, comme les autres volets de l’activité économique, dans le respect d’une gouvernance publique de long terme prenant en compte la rareté des ressources primaires, la nécessaire lutte prioritaire contre l’effet climatique, et la nécessaire prise en compte de l’intérêt général.
Elle doit s’intégrer dans une complémentarité avec l’artisanat local, la production locale à circuits courts, et la chaine intégrée de l’amont à l’aval pour permettre la création de valeur et la maitrise des risques optimisées au bénéfice premier du client et de l’utilisateur final.
Les sources de financement sur le long terme, nécessaires pour permettre des investissements industriels de forte ampleur, telles les infrastructures collectives ou des sites de production nucléaire, requièrent une régulation publique permettant des contrats de long terme, une large participation citoyenne, un contrôle public efficace permettant de faire respecter en premier lieu l’intérêt général.
1.4 - Le décalage des consommations
L’usage de l’électricité est désormais vital pour l’économie dans ses différentes composantes, notamment, éducation, santé, services de sécurité. Il contribue au bien-être social et collectif. La spécificité de l’électricité, qui n’est qu’un vecteur, induit un équilibre en temps réel entre la demande en électricité et la production d’électricité. Cet équilibre peut être établi au niveau local, mais aussi, à un niveau plus intégré, pour bénéficier de la solidarité inter territoires, par l’interconnexion électrique. Les opérateurs qui interviennent sur le système électrique peuvent être en situation de monopole de service public (Dispatching, et autoroutes de l’électricité, RTE, routes nationales et départementales de l’électricité ENEDIS…) ou être opérateur de service public (EDF pour la contribution à la sécurité d’approvisionnement en électricité pilotable décarbonée, fourniture en énergie des tarifs réglementés aux clients domestiques ou pour l’exploitation des systèmes insulaires non interconnectés). Les clients en électricité ont tous la liberté du choix de fournisseur, et pour les clients domestiques, ont la possibilité de revenir au tarif réglementé s’ils ne sont pas satisfaits d’un fournisseur alternatif.
Le développement de la production locale, et du stockage local (batteries, pompage pour la montée gravitaire de l’eau…), associé à une interconnexion électrique qui porte aujourd’hui en Europe sur plus de 500 millions d’utilisateurs, peut diminuer le risque de non maîtrise de cet équilibre. Le développement des réseaux locaux et d’une architecture de réseaux valorisant l’interconnexion électrique la plus large possible (techniquement, si les conditions géopolitiques étaient réunies, il serait possible de boucler l’interconnexion sur tout le pourtour méditerranéen) doivent se poursuivre.
La transparence de l’information disponible sur les effets de pointe, la nature des risques, et leurs causes doivent être établies et partagées le plus largement possible.
La non maitrise de l’équilibre production /demande peut être très sensible à la situation météorologique, du fait de la très forte sensibilité de la demande (impact de 2400 MW sur la demande en électricité de la France à la suite d’un degré de moins sur le périmètre France), ou de faible disponibilité de la production ( intermittence de l’éolien en France qui a varié en janvier 2022 en France de 155 MW à 14848 MW, soit un rapport de 1 à 100, en plein hiver ).
La nature des risques, d’ordre économique, ou technique, avec risque de « black out » et de non maitrise de la sûreté du système électrique, doivent être explicités et demeurer transparents par les opérateurs publics en charge du contrôle de la sûreté du système électrique.
Les fournisseurs d’énergie ont la responsabilité de garantir la contrepartie d’approvisionnement physique pour les contrats commerciaux qui les engagent. Ils doivent assumer les risques industriels en conséquence. La régulation Arenh, dont la seule finalité est l’ouverture du marché à la concurrence, sans prise en compte, ni des risques industriels, ni de la valeur ajoutée par l’opérateur historique engagé dans des missions de service public portant notamment sur la sécurité d’approvisionnement, doit être supprimée.
Le développement des moyens de production intermittents doit être conditionné par la mise à disposition préalable de moyens pilotables décarbonés (production ou stockage) adaptés en volume à la plage de l’intermittence envisagée dans ce développement.
La réglementation du tarif énergie aux clients domestiques, doit être promue et transparente sur les modalités de contribution à l’équilibre demande/production, en s’appuyant sur la réalité économique des moyens pilotables engagés ( notamment parc hydraulique et nucléaire existant) , affranchi de la dépendance aux aléas spéculatifs du marché de gros de l’électricité, et incitatif pour le consommateur final dans le placement optimal de ses consommations (tarifs heures pleines heures creuses, tarif tempo…).
Les opérateurs de service public doivent être reconnus dans la valeur ajoutée qu’ils apportent dans leur contribution à l’intérêt général.
Dans une telle régulation publique adaptée à la prise en compte première de l’intérêt général, la liberté de choix des fournisseurs d’énergie, et de leurs investissements guideront les parties prenantes vers les solutions les plus optimales sur le plan économique, et respectueuses de l’intérêt général, et particulièrement du respect des exigences de sûreté électrique.
https://malicorne.over-blog.com/2022/10/energie-ou-allons-nous-quelques-reperes.html
Thème 2 : Comment satisfaire nos besoins en électricité, et plus largement en énergie, tout en assurant la sortie de notre dépendance aux énergies fossiles ?
Le mix électrique :
Le mix énergétique doit permettre à la France et à l'Europe de retrouver leur autonomie industrielle et énergétique.
En premier lieu, la France et l'Europe doivent reconsidérer l'énergie nucléaire comme un atout stratégique de premier rang pour la production pilotable décarbonée d’électricité. La contre-partie de l'utilisation de l'énergie nucléaire, avec la priorité une à la sûreté nucléaire, est de disposer d'une gouvernance publique engagée sur le long terme, de capacités scientifiques et de compétences industrielles adaptées, d’exploitants nucléaires responsables, d’une autorité de sûreté compétente et indépendante des exploitants, le tout contrôlé par la puissance publique. Cela suppose de supprimer le terme transitoire associé à l'énergie nucléaire.
La durée d'exploitation portée à 80 ans aux US sur des réacteurs de conception initiale similaire aux réacteurs français constitue un retour d’expérience à exploiter.
La décision de renouvellement des réacteurs doit intégrer la nécessaire continuité dans le maintien des compétences de toute la filière industrielle. La démonstration de sûreté à la conception requiert une attention particulière au regard de la responsabilité de l’exploitant nucléaire en matière de sûreté.
La disponibilité des ressources d’uranium requiert une politique diversifiée d’approvisionnement à travers le monde, de maintenir fermé le cycle du combustible avec retraitement des combustibles usés et de reprendre les études de la filière à neutrons rapides. Celle-ci permet de valoriser d’un facteur 50 les réserves disponibles.
L’ouverture à la concurrence ne constitue pas un objectif premier en soi. Les exploitants nucléaires doivent être responsabilisés et contrôlés dans leur contribution au service public, en matière de sécurité d’approvisionnement d’énergie pilotable décarbonée pour le plus grand nombre, de sûreté nucléaire, et de performance industrielle. La régulation ARENH qui n’apporte aucune valeur ajoutée dans la lutte prioritaire contre l’effet de serre climatique et la sécurité d’approvisionnement, et qui est destructrice de valeur au regard des missions de service public, doit être supprimée.
L’exploitant nucléaire historique EDF doit être conforté dans son rôle en prenant en compte la valeur ajoutée du caractère intégré du Groupe pour les missions de service public dont il est investi.
Dans la priorité à la sûreté nucléaire, le nucléaire existant comme les nouveaux pays entrants dans le nucléaire nécessitent un soutien spécifique. Afin que le nucléaire puisse apporter sa contribution d’énergie sûre décarbonée et pilotable dans le mix au niveau mondial, la France et l’Europe, par leur expérience et leur compétence, doivent jouer un rôle actif dans les organisations internationales (AIEA, WANO…)
Le parc hydraulique, intégrant notamment les stations de pompage hydraulique, est également stratégique au titre de la production pilotable décarbonée d’électricité. Les ouvrages, certains plus que centenaires, requièrent une attention particulière au regard de la sûreté hydraulique. L’ouverture à la concurrence des concessions hydrauliques n’est pas un objectif en soi. Les exploitants hydrauliques doivent être responsabilisés et contrôlés dans leur contribution au service public, en matière de sécurité d’approvisionnement d’énergie pilotable décarbonée pour le plus grand nombre, de sûreté hydraulique, et de performance industrielle. La régulation hydraulique prend en compte le multiusages de l’eau (production d’électricité, irrigation, eau potable, loisirs…). Les opportunités de développement de nouvelles installations de pompage/stockage, y compris maritimes, doivent être étudiées.
Le développement des énergies renouvelables ne doit pas porter préjudice à l’équilibre des comptes publics ni au pouvoir d’achat du consommateur final. L’électricité française déjà décarbonée, grâce au parc hydraulique et nucléaire existant, doit conduire, au regard du principe de subsidiarité de l’Union Européenne, à réinterroger le calendrier de déploiement du nouveau renouvelable en France. Avec une intermittence qui peut introduire un facteur de variation de 1 à 100 en plein hiver (cf la production éolienne d’électricité qui a varié en janvier 2022 en France de 155 MW à 14848 MW ), le respect des engagements pris au titre de la COP 21, au niveau de la France et de l’Union Européenne, exige, au préalable de tout nouveau développement de renouvelable intermittent, de prendre en considération le pilotable décarboné disponible et garanti prévu dans les décennies à venir, avec des marges suffisantes au regard de la sûreté du système électrique et des objectifs de diminution des émissions de carbone. La prise en compte comme moyen pilotable décarboné de stockage dans des batteries et dans la production décarbonée d’hydrogène requiert de disposer de pilotes industriels apportant une démonstration robuste de la faisabilité industrielle et de la rentabilité économique.
L’élaboration de la cible du mix énergétique requiert la prise en compte du cycle carbone et des enjeux socio-environnementaux et économiques de l’évolution des réseaux et des infrastructures logistiques associées d’approvisionnement et de distribution jusqu’au client final.
La concertation la plus étroite possible avec les populations et les territoires concernés doit accompagner enfin toute évolution du mix énergétique.
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