La Syrie, plusieurs fois millénaire, est une terre de croisement de peuples, parfois dans la guerre, souvent dans la paix. C'est le lieu d'apparition de l'alphabet, une mémoire vivante des temps antiques, un pilier de la civilisation arabe et la tête de pont d'une des nouvelles routes de la soie vers l'Asie.
La Syrie va-t-elle enfin connaître une nouvelle ère de paix et de développement pour le bénéfice d'abord des Syriens eux-mêmes mais aussi de tout l'espace euro-méditerranéen et du monde ?
La guerre en Syrie, dans laquelle des dizaines de pays se trouvent encore aujourd'hui engagés, a été initiée en 2011 sur fond de contestation interne amplifiée par une agression extérieure soutenue notamment par les US et la France alignée, - deux membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies - et les monarchies féodales du Golfe.
Une volonté de maîtrise de l'accès aux ressources pétrolières et gazières et de leur transit constitue l'un des facteurs déclencheurs de cette guerre.
La confrontation en zone alliée russe entre une approche unipolaire hégémonique mondiale revendiquée par les Américains et une approche multipolaire de coopération soutenue par les Russes est l'autre sous-jacent fondamental de cette guerre.
Celle-ci était de nature à constituer le germe d'un nouveau conflit mondial de par les parties prenantes engagées.
Cette guerre a ouvert la porte à des barbaries sans nom de la part de groupes armés par des entités extérieures à la Syrie en violation complète du droit international. Ces groupes barbares, faisant appel à tous les ressorts du fondamentalisme religieux, en premier lieu islamiste, ont tué des milliers d'enfants, pilonné des centaines d'écoles et d'hôpitaux, détruit de très nombreuses infrastructures vitales pour la population civile en touchant des millions de personnes, semé la terreur en torturant et tuant des milliers de personnes civiles pour leur seule opinion.
Ces groupes, armés de l'extérieur, ont agi de la sorte en Syrie, dans un grand silence lui-même inacceptable des grands médias occidentaux. Cette guerre a en effet donné lieu également à des actions de propagande de guerre orientées dans un seul sens et relayées très massivement par de grands médias ayant perdu leur nécessaire capacité d'interpellation critique, pourtant fondement de leur existence en terme de pouvoir d'information et donc de contre pouvoir.
Ignorer ces éléments qui ont coûté la vie à des centaines de milliers de vies innocentes est similaire à la négation des crimes du nazisme.
Les maladresses d'un Gouvernement, néanmoins respectueux de la justice de son pays et de sa constitution, ne peuvent justifier l'inacceptable violation du droit international qui a conduit, sans aucun mandat international du Conseil de sécurité des Nations Unies, à soutenir militairement de tels groupes armés contre un État reconnu par l'ONU et qui ont pris en otage des populations civiles et commis en très grand nombre des actes odieux de barbarie sur celles-ci.
La justice devra poursuivre tous ces soutiens, politiques, militaires, financiers, et médiatiques.
La Syrie était légitime pour se défendre.
La Syrie multiconfessionnelle et laïque, avec l'appui de ses alliés, notamment l'Iran et la Russie, a su résister, avec des centaines de milliers de victimes innocentes, des millions de personnes déplacées, et des cités et infrastructures à reconstruire intégralement. Place donc à la justice et enfin, je l'espère le plus tôt possible, à la paix, à la réconciliation et à la reconstruction en Syrie, et plus largement dans tout le Moyen Orient.
Et laissons une bonne fois pour toute les Syriens s'auto-determiner et choisir leurs dirigeants et leurs alliés. La souveraineté de la Syrie pour le peuple syrien a autant de valeur que celle de la France pour le peuple français.
La France doit désormais quant à elle s'écarter résolument et clairement du dangereux alignement guerrier atlantiste et non respectueux du droit international, notamment en sortant de l'Otan qui n'a plus aucune raison d'être. Elle doit suspendre sans délai toutes ses sanctions contre le peuple syrien et rouvrir son Ambassade à Damas. Elle doit retrouver une politique extérieure d'équilibre entre les différentes composantes du monde arabe et Israel.
L'enjeu du retour à cette paix durable en Syrie, c'est le respect de la justice, de la liberté et une contribution majeure au maintien de la paix dans le monde.
Aucun État, émanation politique d'un peuple, et encore moins, aucune entité dotée d'un pouvoir spécifique, militaire ou financier, ne peut prétendre vouloir assurer une hégémonie mondiale.
Le respect des personnes dans la gouvernance des peuples, et de celui des Etats, émanation des peuples, dans la gouvernance des Nations, et dans tous les cas l'équilibre des pouvoirs avec la primauté au politique pour la prise en considération du long terme et des générations futures, des libertés individuelles comme des libertés collectives, conditionnent la justice, la paix, l'ouverture et la coopération à travers le monde.
Cette disposition, sans écarter le fait que la barbarie et la corruption peuvent exister et doivent en conséquence être combattues à la source avec la plus grande fermeté, repose sur la conviction fondée sur l'histoire qu'il est possible d'établir, pas à pas, cas par cas, de telles gouvernances, dans la paix et la coopération, et non dans la violence et l'oppression.
Une telle confiance partagée ne peut trouver sa source à mon sens que dans une spiritualité ou une philosophie qui place non seulement le respect mais aussi l'émerveillement de la vie au cœur de l'action de chaque citoyen.
En donnant à chacun le désir d'aider l'autre à s'épanouir et non d'abord de se servir, quitte à écraser l'autre en utilisant tous les stratagèmes, y compris l'usage du fondamentalisme religieux, islamiste ou autre.
Puisse le règlement proche de ce conflit en Syrie nous aider à ouvrir de telles pistes vers la paix dans d'autres situations de conflit. Je pense en premier lieu à la relation entre Israel et la Palestine, mais également à l'Ukraine, au Yemen, et à toutes les autres situations de conflits en Afrique et ailleurs.
Lectures
Genevieve et Jean-Claude Antakli, Syrie, une guerre sans nom! Cris et châtiments. éditions François Xavier de GUIBERT, mars 2014
Christian Chesnot et Georges Malbrunot, les chemins de Damas. Le dossier noir de la relation franco-syrienne. Robert Laffont juin 2014
Tempête sur le Grand Moyen Orient , Michel Raimbaud, Ellipses, deuxième édition, février 2017
Pour retrouver tous les articles du blog de Malicorne dédiés à la Syrie